Crise au Mali : La position de la CEDEAO sur la situation au Mali est-elle toujours partagée par la France ?

Dans un communiqué fait le 18 août, le ministre français des affaires étrangères a condamné le coup de force militaire qui a conduit a la démission du président Ibrahim Boubacar Keïta avec une précision particulière qui est que la ‘’France partage la position de la CEDEAO’’. Mais après l’annonce de sa démission par le président Ibrahim Boubacar Keïta tard dans la du 18 août, et les décisions du sommet virtuel extraordinaire des chefs d’États de la CEDEAO le 20 août , la France ne s’inscrit plus dans la même ligne de vision que la CEDEAO sur la question du Mali.
La divergence des points de vu est venue de la décision aventurière des Chefs d’Etats de la CEDEAO de rétablir l’ancien Président Malien Ibrahim Boubacar Keïta à ses fonctions de chef d’Etat, par tout moyen et même contre la volonté du peuple malien. Au sein de l’organisation même la question du rétablissement du pouvoir d’IBK a suscité des réactions vives. Pendant que les présidents Ivoirien Alassane Ouattara et Guinéen Alpha Condé prônaient la prise de décision sévères contre les putschistes maliens et le retour de IBK au pouvoir, les autres chefs d’Etats ne voient pas la roue de ce côté. Ainsi Alassane Ouattara, de concert avec son homologue guinéen affirme que « Nous devons agir, avec détermination afin d’obtenir, par tous les moyens, le rétablissement de l’ordre constitutionnel au Mali ». Macky Sall du Sénégal, soutenu notamment par Roch Kaboré et plusieurs autres de ses homologues a estimé qu’il « faut agir avec responsabilité et célérité afin d’éviter que le Mali ne sombre dans un vide institutionnel et dans une impasse politique ». A l’issue du sommet il a été décidé du rétablissement du régime demis et de l’adoption de sanctions contre le Mali.
Le président Français Emmanuel Macron lui aussi est d’avis que le coup de d’Etat en soi est condamnable, mais reconnais que la souveraineté revient au peuple Malien qui a le dernier mot. Pour lui, la France et l’Europe a condamné ‘’un coup d’Etat militaire contre un président démocratiquement élu’’ mais, précise Macron, « nous n’avons pas à nous substituer à la souveraineté malienne ou au peuple malien.» L’intérêt de cette précision est que la France avait partagé la position de la CEDEAO au début du putsch. Mais maintenant que la CEDEAO est entrain de se substituer à la souveraineté malienne et au peuple malien, il était important que la France montre sa nouvelle position. Ainsi l’organisation sous régionale, autre fois digne de confiance, reste seule dans sa volonté de vouloir rétablir IBK contre vent et marré .
A cette allure, il est évident que la CEDEAO est entrain de perdre sa crédibilité au yeux des peuples de tous les pays mais aussi de la communauté internationale en s’illustrant comme un défenseur des chefs d’États vis-à-vis de leur peuple et non un défenseur des intérêts du peuple. Et ce, sous la houlette des présidents qui ont pour dénominateur commun ‘’la volonté de violer leur constitution pour briguer un 3e mandat’’ contre la volonté du peuple. Ces derniers compte d’ailleurs utiliser la CEDEAO comme soutien de leur candidature. Il reviendra à leurs homologues de choisir entre la défense des intérêts des peuples d’Afrique de l’Ouest pour conserver la crédibilité de l’institution et leur propre dignité, et la défense des Chefs d’États impopulaires au détriment des peuples auquel cas leur propre dignité et la crédibilité de la CEDEAO seraient mis en jeux.
Par Augustin Sankara